ORDINATEUR



Au contraire d’un John Brunner dans Sur l’Onde de choc en 1975, Philip K. Dick n’a jamais anticipé à la lettre l’informatique individuelle. Non, son ordinateur à lui, géant par essence, nous semble aujourd’hui d’une touchante naïveté prospective. Sauf que l’humour par lequel il se moque des prétentions de ce Monsieur Ordinateur est comme un clin d’œil à cette multitude de ces messieurs les ordinateurs dont, mort trop tôt, il ne verra pas la naissance dans les années 1980. Car quand il perd les pédales, du haut de sa magnificence, Monsieur Ordinateur, cet auguste centralisateur électronique, fait « sortir des grenouilles de tous les conduits d’aération de la Terre » ou envoie « une troupe de clowns de cirque » en lieu et place « des secours, des pompiers, de la police »1. S’il n’était qu’un vulgaire PC portable, personne ne se rendrait compte du délire. Un ordinateur clown parmi des millions ou des milliards ? Tant mieux, à la limite. On devrait même en sourire, et souhaiter que mille PC ou Mac se mettent ainsi à nous rendre plus fou qu’une IA déchaînée. Mais lorsque Monsieur Ordinateur pilote à lui seul les destinées d’une Nation, voire d’une planète, c’est le monde entier qui rit jaune.


1 Philip K. Dick, « Le jour où Monsieur Ordinateur perdit les pédales » (1977), dans Nouvelles, 1963-1981, Denoël/Présence (1998), p. 590-599.

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